Entreprise spécialisée dans le recueil d’informations sur l’historique des véhicules, carVertical alerte sur la présence encore trop frappante de voitures récentes aux compteurs trafiqués. Marques prestigieuses comme tous publics sont concernées.
Au-delà de l’aspect esthétique et, plus important encore, de son tarif, les automobilistes à la recherche d’un véhicule d’occasion s’attarde généralement sur le nombre de propriétaires. Nous avons tendance à penser qu’une voiture de première main a moins souffert ou qu’elle a été traitée avec davantage de soin. De fait, si elle a été achetée neuve, son unique propriétaire l’a logiquement bichonnée en faisant attention à ne pas froisser la mécanique. Tout en évitant de subir une rayure venant lui rappeler le montant de son bon de commande. Car la première immatriculation d’un véhicule implique directement une décote. À moins d’avoir une édition limitée, luxueuse ou non, comme ce fut récemment le cas de la Citroën Ami Buggy, dont la première série de 50 exemplaires s’est vendue en 18 minutes l’année dernière.
Afin de ne pas être embêtés par cette décote immédiate, mais plutôt d’en profiter, les acheteurs de voitures d’occasion sont souvent à la recherche de modèles âgés de trois à cinq ans. Ils présentent généralement l’avantage d’avoir connu un unique propriétaire mais également d’afficher un compteur kilométrique relativement faible. Mais attention aux fausses bonnes affaires ! C’est ce que souligne l’entreprise spécialisée dans le recueil d’informations sur l’historique des véhicules, carVertical, dans sa dernière étude publiée début novembre. On y apprend que 6,4 % de toutes les voitures âgées de moins de 5 ans vérifiées sur leur plateforme en France ont un kilométrage trafiqué. Une proportion énorme pour des véhicules récemment sortis d’usine.
Une simple manipulation à l’aide d’un boîtier
Naïvement, nous pourrions être tentés de penser que seules les anciennes voitures équipées d’un compteur mécanique pouvaient être concernées par cette fraude. De fait, il fut un temps pendant lequel mettre un véhicule sur des rouleaux tournant à l’envers permettant de réduire le kilométrage affiché. Inutile d’en arriver à là pour les automobiles plus modernes. Un boîtier connecté à l’ordinateur de bord permet de modifier à sa guise le nombre indiqué, et cela aussi simplement que rapidement. « Les constructeurs développent des barrières pour empêcher cela mais les malfrats trouvent toujours une manière de les contourner », nous précise Matas Buzelis, en charge de la communication chez carVertical depuis le siège en Lituanie.
En janvier dernier, l’entreprise avait déjà publié une étude sur cette arnaque à l’échelle internationale. Sans prendre en compte de potentielles distinctions d’âge, l’enquête montrait que près d’une voiture sur six serait concernée sur le marché mondial de l’occasion. « Pour la France, nous avons des fichiers de plusieurs centaines de milliers d’historiques, que notre logiciel analyse ensuite pour détecter les anomalies kilométriques », poursuit Matas Buzelis. À travers le monde, le classement des modèles les plus concernés montrait l’Audi A8 sur le haut du podium, proportionnellement devant la Ford Mustang et le Volkswagen Touareg.
Un achat qui peut coûter cher à l’automobiliste victime
Si l’on en revient à la France et ses voitures de moins de cinq ans, carVertical rappelle que les modèles importés de l’étranger sont les plus susceptibles d’être concernés par cette fraude. En effet, les données du compteur kilométrique sont souvent perdues lors des transactions transfrontalières. Les pays ne s’échangent pas forcément les détails des factures et autres documents pouvant attester du relevé kilométrique. « Certains acheteurs de voitures neuves s'engagent à ne pas dépasser un certain kilométrage afin d'obtenir un meilleur financement ou de réduire le montant des mensualités. Cependant, les conducteurs frauduleux ont tendance à ignorer ces accords et se contentent de remonter le compteur kilométrique afin de baisser le nombre de kilomètres affichés », explique Matas Buzelis, également expert automobile chez carVertical, qui rajoute que ces opérations sont souvent le fait de malfaiteurs organisés dans le pays d’origine de la voiture.
Il ne faut pas oublier qu’acheter involontairement une voiture au kilométrage falsifié peut se révéler très coûteux pour l’automobiliste. Des pannes inattendues pour un véhicule aussi peu kilométré peuvent ainsi intervenir, ce qui implique un risque élevé d’accident. D’autant qu’une fois la tromperie découverte, la valeur du véhicule baisse fortement. Pire encore, il peut être bloqué car non-conforme à la législation française. Au niveau de l’entretien, cette fraude peut coûter jusqu’à 25 % plus cher à l’acheteur. Il est donc activement conseillé, lors de l’achat d’une voiture d’occasion, de ne jamais se précipiter. Effectuer un essai routier, étudier les papiers d’entretien mais également se rendre chez un professionnel pour analyse sont autant de comportements à adopter pour ne pas se faire piéger.
Porsche, marque la plus concernée en France
« Plus les véhicules sont populaires, plus ils ont de risques d’être frauduleux. La demande et les conditions économiques sont des facteurs à prendre en compte », nous met en garde Matas Buzelis. Selon les données de carVertical en France, les voitures affichent, en moyenne, 23 876 km au compteur après 1 an d'utilisation, 48 713 km après 3 ans et 71 470 km après 5 ans. « C’est au cours de la première année, à sa sortie de chez le concessionnaire, que le kilométrage d’un véhicule augmente le plus. Les véhicules neufs sont généralement plus adaptés aux longs trajets, car la garantie constructeur est une assurance parfaite pour que tout soit pris en charge en cas de problème sur la route», précise Matas Buzelis.
Dans le détail, il est surprenant de constater que Porsche représente 12,3 % de tous les modèles contrôlés en France, âgés de moins de 5 ans et présentant un compteur trafiqué. « C’est une marque désirée et c’est là que la concurrence malsaine intervient. Sous le coup de l’émotion relatif à un tel achat, certains automobiles ne prennent plus les précautions nécessaires », s’alarme l'expert de carVertical. BMW (10,3 %), Land Rover (8,7 %), Renault (8,2 %) et Opel (8,1 %) suivent le classement. À l’inverse, Mercedes fait figure de très bon élève grâce à une sécurité informatique très développée. Difficile alors de trafiquer ses compteurs digitaux. Pas même en marche arrière.
Article rédigé en collaboration avec Décision Atelier Aftermarket, le magazine de référence des réparateurs automobiles édité par ETAI.